Analyse 2009-15

En décembre 2009, la conférence de Copenhague remet à l’avant de la scène les problèmes climatiques pendant quelques jours. Au quotidien, les valeurs changent au sein des familles et l’écologie devient un élément de plus en plus important.


Difficile de l’ignorer : la Conférence de Copenhague essaie de dégager de nouveaux objectifs pour atténuer les modifications climatiques provoquées par l’activité humaine. Pas moyen d’ouvrir un journal, d’écouter la radio ou la télé, de consulter les dépêches sur le net sans en entendre parler. D’abord les experts internationaux, puis les ministres en charge de ces dossiers, puis enfin les chefs d’état, dont certains ne passent finalement que quelques heures sur place pour signer les accords éventuels, se succèdent à Copenhague pour tenter de trouver des accords internationaux sur des objectifs communs pour les années à venir. Les débats font généralement rage dans ces conférences internationales, puisqu’il s’agit de déterminer les efforts de chacun, ce qui a des conséquences financières et industrielles importantes pour les pays concernés. En période de crise économique, c’est encore plus difficile à mettre en Å“uvre qu’en période d’opulence, où les « marges budgétaires » sont plus faciles à dégager. Mais si les manières de réagir se discutent, peu remettent en cause la nécessité de réagir, de manière rapide et significative. L’avenir de la planète est en jeu. « C’est probablement la dernière chance de l’humanité de maîtriser le changement climatique avant qu’il ne soit trop tard, afin que notre génération ne trahisse pas ses enfants », affirment les organisateurs de la conférence. Malgré cela, certains jouent pourtant sur la corde du doute et n’hésitent pas à remettre en cause la réalité du réchauffement climatique et ses conséquences, à dénoncer les futurs transferts de fonds vers les pays du Sud comme inutiles, etc. Ainsi Michael Modrikamen, fondateur du récent « Parti populaire », n’hésite pas à mettre en doute la validité des études scientifiques. « On semble nous dire aujourd’hui qu’il y a une vérité religieuse : le réchauffement climatique menace la planète. Or je constate que dans de nombreux pays, le débat fait rage car il n’y a pas de consensus scientifique sur la réalité du réchauffement, sur les projections faites à long terme. Beaucoup de professeurs d’université nous disent que les modèles mathématiques qui conduisent à la théorie du réchauffement sont imprécis et non fiables. » (1)


Peu importe ici les éventuels débats entre scientifiques (2) et l’utilisation par certains de ces débats de manière populiste, il est clair que les enjeux ont des implications directes dans le vécu des familles d’aujourd’hui.


Et les familles


Bien sûr, la limitation des effets néfastes de l’activité humaine sur le climat, les options pour un développement durable, la sauvegarde de la planète dépendent en première ligne des gouvernements et des grandes politiques industrielles. Ce sont les recherches scientifiques qui permettent la mise au point de technologies moins polluantes, ce sont les politiques mises en Å“uvre par les différents niveaux de pouvoir qui peuvent favoriser certains comportements plus responsables, mais une partie importante des changements possibles dépend du comportement quotidien des familles.De plus en plus, les familles ont conscience de l’enjeu, c’est-à-dire qu’elles ont intégré l’idée que le sort de l’humanité était en jeu. Une étude d’Ethicity (3) menée en France en juin 2009, révélait que pour 75% des Français, l’enjeu n’est pas de les convaincre de l’importance du sujet, mais de leur donner les moyens d’agir. Pour les parents, cela se concrétise de manière très immédiate par le souci pour l’avenir et la santé future de leurs propres enfants, voire de la génération suivante.


Le public familial est d’ailleurs particulièrement réceptif lorsqu’il s’agit du bien-être de ses enfants. On constate par exemple souvent un changement des habitudes du couple par la prise de conscience de responsabilités nouvelles à l’occasion de la naissance du premier enfant : changement des pratiques de consommation, d’alimentation, de loisirs, etc. Priorité est souvent donnée au bien-être de l’enfant.


Qui éduque qui ?


Si les parents changent leur mode de vie à l’occasion de l’arrivée des enfants, s’ils essaient ensuite d’inculquer de « bonnes pratiques » à leur progéniture, il faut aussi remarquer que l’éducation ne se fait pas à sens unique, en particulier pour ce qui concerne les comportements plus écologiques.Comme dans tous les secteurs nouveaux (ne pensons par exemple qu’à tout ce qui touche aux nouvelles technologies), les enfants sont souvent beaucoup plus réceptifs que leurs parents, ne serait-ce que parce qu’ils n’ont pas encore pris de lourdes habitudes de comportement et qu’il grandissent et se façonnent en contact avec les nouvelles préoccupations.


Dès l’école maternelle, ils sont souvent sensibilisés à tout ce qui se rapporte à l’écologie et au développement durable. Ils apprennent très tôt qu’il ne faut pas laisser couler l’eau du robinet quand on se brosse les dents, qu’il faut éteindre la lumière quand on quitte une pièce, etc.  C’est donc souvent eux qui rappellent leurs parents à l’ordre dans les pratiques de la vie quotidienne : choisir des fruits et légumes de saison, opter pour des modes de transport moins polluants, etc.


Déjà beaucoup de changements


Le grand battage médiatique que l’on connaît autour d’événements comme la Conférence de Copenhague laisse parfois perplexe. Entre les optimistes qui relèvent le positif des accords engrangés et ceux qui estiment que l’on va droit à la catastrophe, on peut au moins relever les capacités de changement des familles. Qui aurait pu imaginer il y seulement 20 ans que la plupart des familles trouveraient normal de trier les déchets et s’y tiendraient, que l’on pourrait se passer des sacs plastiques jetables dans les supermarchés, que le vélo redeviendrait un moyen de transport dans le vent, etc. ? On pourrait allonger la liste. L’important est de constater que les familles sont susceptibles de changements de comportements, pour autant que l’information qui leur parvient les conscientise aux nécessités d’adopter d’autres manières de vivre pour préserver les chances de bien-être pour eux-mêmes et leurs enfants.


Mieux plutôt que plus ?


Dans la foulée, de nouveaux concepts apparaissent et commencent à faire leur chemin dans les mentalités. On entend de plus en plus souvent parler de décroissance, de vie simple, de sobriété volontaire, etc. Il était impensable jusqu’il y a peu d’imaginer que les générations futures vivraient moins bien que nos propres générations. Et vivre mieux ne se concevait pas autrement qu’en disposant de plus de biens matériels, en consommant davantage.Cette bible de la croissance semble aujourd’hui remise en cause par une frange de plus en plus large de la population. Sans entrer dans les débats sur la validité économique d’un modèle de décroissance, on peut au moins se réjouir d’une certaine prise de distance vis-à-vis du « tout à l’économique » qui fait rage depuis quelques décennies, et en particulier depuis la chute du bloc communiste, interprétée comme la victoire de l’économie de marché et de ses valeurs sous-jacentes.Les familles commencent à concevoir que vivre mieux n’implique pas nécessairement de consommer davantage, que l’être peut prendre un peu plus d’importance que l’avoir. On ne peut que s’en réjouir. Reste que cela reste souvent des préoccupations de riches, qui peuvent revoir leur mode de vie à la baisse sans se priver de l’essentiel. Il restera à prendre conscience que la question du réchauffement climatique se pose avec une urgence bien plus forte pour les pays pauvres. On sait que 20% de la population mondiale consomment 80% des ressources de la planète. Si le ressort qui fait bouger les familles est l’avenir de leurs enfants, il faudrait encore une action pédagogique massive pour qu’elles considèrent qu’elles ont aussi la responsabilité de l’avenir de tous les enfants de la planète. La route est encore longue (4).  

 

 


 

(1) Michael Modrikamen dans une interview à La Libre Belgique, le 18/12/2009.
(2) Jean-Pascal Van Ypersele, climatologue belge, vice-président du GIEC, faisait remarquer récemment dans une interview que les « contre-rapports scientifiques » à propos du climat étaient généralement peu fiables et émanaient de lobbys industriels qui tentaient par là de défendre leurs intérêts, alors que la communauté scientifique internationale, si elle n’est pas à l’unisson sur tout, ne remet pas en cause les perspectives du réchauffement climatique.
(3) Ethicity est une agence indépendante créée en 2001 spécialisée dans le conseil en stratégie de développement durable. Etudes et documents sont disponibles sur le site www.ethicity.net. Analyse rédigée par José Gérard.

 

 

 

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